Quand on exécute une transaction ou une restructuration corporative, on vise un grand éventail d’opérations, allant de l’incorporation, l’émission d’actions, en passant par le transfert d’actions ou d’actifs, les roulements d’actions ou d’actifs, la liquidation d’une société ou la fusion de certaines sociétés. Si cette opération est révisée par les autorités fiscales, évaluée, interprété ou même contestée devant les tribunaux, la question préliminaire, qui peut sembler banale, consiste notamment à déterminer en premier lieu si la transaction elle-même a effectivement eu lieu en droit.
Il est important de s’assurer, avant tout que la transaction elle-même est conforme et valide selon les lois qui lui sont applicables, que toutes les composantes ont bien été respectées. C’est la doctrine de la transaction incomplète qui vise à savoir si une transaction avait une substance juridique et si toutes les étapes ont été effectivement et complètement exécutées. En termes simples, cela peut se résumer à se demander notamment les questions suivantes :
- Est-ce qu’une fiducie a été validement constituée?
- Est-ce que le signataire a été validement autorisé ?
- Le paiement de la transaction a-t-il bien été fait et la contrepartie a-t-elle bien été reçue?
- Le transfert d’actions ou d’actifs a-t-il réellement eu lieu?
Ces questions sont importantes puisque la responsabilité fiscale et civile du contribuable est basée sur ce qui s’est passé et non sur ce qu’une partie aurait préféré faire rétrospectivement1.
La Cour suprême du Canada a confirmé, voilà presque 40 ans, la règle voulant qu’aucune opération de planification fiscale ne peut être reconnue à des fins fiscales à moins d’avoir été établie valablement selon les règles du droit général. Il est possible de perdre un avantage fiscal si une opération est jugée incomplète ou inefficace parce que l’on a omis de se conformer à des formalités juridiques indispensables2. Ex. le paiement des actions, les émissions d’actions ou d’un billet dans le cadre d’un roulement et ce, même si ce paiement n’est que d’un dollar.
Tous les gestes des parties doivent être conformes à la loi applicable. Le fait d’utiliser certains moyens pour parvenir au résultat souhaité ne suffit pas; il faut s’assurer que non seulement ces moyens paraissent réguliers, c’est-à-dire en règle quant à la forme mais, de fait, ils constituent, à tous égards, des transactions juridiquement valables et réelles3.
Il en vaut la peine de revenir sur les principes de base afin de discuter des effets du contrat entre les parties, les contrats étant au cœur-même de nombreuses opérations en matière corporative. Le contrat créé un devoir d’exécution entre les parties à un contrat, d’où le principe selon lequel tout contrat valablement formé oblige ceux qui l’ont conclu4. Et la force obligatoire du contrat oblige chaque partie à respecter celui-ci et les obligations qui en découlent.
Dans un environnement transactionnel en évolution rapide aujourd’hui, ceci sert de rappel que la doctrine de la transaction incomplète peut servir d’argument de contestation d’une transaction et lorsque les formalités juridiques requises pour donner effet à une opération n’ont pas été respectées, le contribuable sera alors imposé selon les résultats obtenus.
En conclusion, toute transaction ou opération de quelque nature nécessite qu’elle soit minutieusement planifiée, pleinement exécutée et soigneusement documentée, le tout dans le but d’éviter des conséquences inattendues et parfois fâcheuses.
Nous vous invitons à communiquer avec l’équipe d’AVENS pour l’analyse ou la rédaction de transactions ou opérations corporatives envisagées
- Mac’s Convenience Stores Inc. c. Canada (Procureur général), 2015 QCCA 837; Canada (Attorney General) c. Groupe Jean Coutu (PJC) inc., 2015 QCCA 838
- Stubart Investments Limited c. Sa Majesté la Reine, 1984 CanLII 20 (CSC), [1984], 1R.C.S. 536; Lloyd c. La Reine, 2002 CanLII 879
- Atinco Paper Products Ltd. c. La Reine, [1978] C.T.C. 566 (C.A.F.)
- Article 1434 du Code civil du Québec, RLRQ, c. CCQ-1991